Speech Barroso over het "plan D" na de Franse en Nederlandse afwijzing van de Europese Grondwet (fr)

woensdag 8 juni 2005

José Manuel BARROSO
President of the European Commission

Preparation of the European Council (Brussels 16/17 June)

European Parliament
Strasbourg, 8 June 2005

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Députés,

Les résultats des referenda en France et aux Pays-Bas représente pour la Commission Européenne et également, j'en suis sûr, pour la majorité de ce Parlement, une source de préoccupation. Préoccupation parce que ce résultat risque d'affaiblir l'Union. Préoccupation également car il s'agit de deux pays qui ont toujours été des protagonistes importants de notre projet commun.

Au long de son histoire, l'Union a déjà vécu d'autres situations difficiles, mais l'engagement et la conviction de ces responsables ont permis de les surmonter et de relancer le projet européen.

Permettez-moi, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Députés, de partager avec vous quelques réflexions que m'inspire le parallélisme entre la situation actuelle et celle d'il y a 50 ans et mon souhait qu' encore une fois nous soyons capables de transformer une crise en opportunité.

Le fait que les préoccupations des citoyens se soient exprimées par un vote démocratique, à la suite d'un très vif débat est un signe encourageant. Ceci est positif en soi et nous devons avant tout respecter l'expression de la volonté des citoyens. Mais nous devons honnêtement reconnaître que ce débat a souvent été mélangé à des enjeux nationaux et les arguments échangés avaient souvent peu à voir avec la Constitution européenne. A part les considérations purement nationales, la vérité est que les consultations populaires sont devenues l'occasion pour exprimer les craintes des citoyens en ce qui concerne le modèle social européen, les délocalisations, le fait que l'Europe aille trop vite et s'étende trop loin, ou même ce qui est perçu comme la menace de la mondialisation.

Même si l'on accepte que dans les débats référendaires il y a eu de la contamination par d'autres sujets, on doit reconnaître que ce vote traduit l'expression d'une position à l'égard de l'Union et du projet européen. C'est ainsi que, les présidents du Parlement européen et du Conseil, et moi-même, au Berlaymont, nous avons souligné dans notre déclaration commune après le référendum français que "les responsables politiques nationaux et européens doivent faire davantage pour expliquer le vraie dimension des enjeux et la nature des solutions que seule l'Europe peut apporter" et que "nous devons nous interroger sur le rôle de chacun d'entre nous... pour contribuer à une meilleure compréhension de ce projet qui ne peut pas avoir de légitimité propre sans être à l'écoute des citoyens."

La teneur des débats et le résultat des deux referenda impose donc une sérieuse réflexion sur notre capacité - celle des institutions européennes aussi bien que celle des Institutions et des autorités nationales - à mobiliser l'adhésion et l'engagement des européens. Nous devons reconnecter l'Union avec les citoyens et les citoyens avec l'Union européenne. Ceci est un impératif et j'aurais l'occasion d'y revenir dans les prochaines semaines .

Mais aujourd'hui la question la plus urgente à laquelle nous devons répondre, face à une situation qui pourrait mettre un coup d'arrêt à la construction européenne, est la suivante: comment faire émerger un nouveau consensus politique et utiliser ce moment difficile comme une opportunité pour relancer l'Europe ? Il y a une difficulté politique. Il faut trouver une solution à cette difficulté politique.

Je voudrais d'emblée souligner clairement que les ratifications sont avant tout l'affaire des États membres . C'est à eux qu'il revient de décider quand et comment ratifier et s'ils souhaitent maintenir l'engagement qu'ils ont pris ou y renoncer. Dix Etats membres ont à ce jour ratifié la Constitution dont un d'entre eux, l'Espagne, par le biais d'un référendum très clair. Dans deux autres Etats membres des referenda se sont révélés négatifs. Mail il y a aussi d'autres qui ne sont pas exprimés et il faut dire que tous les Etats Membres ont le droit d'exprimer leur position.

Néanmoins, ce qui est essentiel à mes yeux aujourd'hui, c'est que les Etats membres réagissent ensemble à la situation actuelle et que nous évitions des actions unilatérales et dispersées. C'est pour cette raison que je leur ai demandé d'attendre le Conseil européen de la semaine prochaine pour arrêter leur position. Je constate que les gouvernements ont largement fait preuve de retenue et là où les prises de position ont été jugées incontournables, pour des raisons internes, les gouvernements ont respecté un souci de modération et préservé la possibilité d'un débat et d'une décision collective.

Le sort de la Constitution est désormais entre les mains des Etats membres. Il est important que les Chefs d'Etat et de gouvernement analysent et discutent de la situation actuelle et envoient un message clair à tous les Européens . Je suis convaincu qu'il est possible et souhaitable que ce message traduise la volonté d'arriver à un nouveau consensus politique en Europe.

L'analyse de la situation actuelle fait apparaître deux éventuelles solutions, et je souligne, se situant à des extrêmes opposés et qu'il faudrait, à mon avis, éviter à tout prix:

  • a première fausse bonne solution serait de dire que rien ne s'est passé et qu'il faut continuer «  bussiness as usual  » comme si rien ne s'était passé. Il s'agirait d'une attitude irresponsable, arrogante et non respectueuse de la volonté exprimée par les citoyens qu'il est de notre devoir d'écouter;
  • ais il y a aussi une autre fausse bonne solution qui serait d'abandonner le projet de Traité constitutionnel. Il s'agirait d'ignorer que dix États membres l'ont déjà ratifié et que le vote négatif dans deux états ne correspond pas à un projet alternatif.

Il nous faut donc créer les conditions pour une solution, pour l'émergence d'un nouveau consensus politique. Sans mettre en cause le projet de Traité constitutionnel, il faut faire avancer l'Europe et éviter la paralysie. Cette solution ne peut que résulter d'une analyse approfondie, d'un débat franc et d'un esprit de compromis entre les 25 Etats membres réunis au sein du Conseil européen, mais aussi avec la pleine participation de la Commission et en écoutant attentivement ce Parlement européen, les Parlements nationaux et la société civile .

Il ne s'agit pas d'un « plan B », cela n'existe pas et n'a jamais existé. Mais peut-être on pourrait parlé d'un « plan D », pour Dialogue et Démocratie, a travers lequel les institutions devraient se livrer à un exercice d'écoute et de débat avec les citoyens et la société civile afin d'approfondir le diagnostic d'une situation complexe qui devrait être la source d'un parcours plus consensuel parce que plus représentatif du sentiment des européens.

Face au scepticisme exprimé par une partie de nos concitoyens, nous devons montrer que l'Union européenne peut répondre - maintenant plus que jamais - à leurs préoccupations et relever les multiples défis du millénium qui est là. Les résultats des referenda de la semaine dernière sont un problème sérieux, et ce ne sera pas le dernier, mais l'Europe est plus que jamais nécessaire.

La Commission continue et continuera à prendre d'importantes décisions qui procurent de réels avantages à tous les citoyens de l'Europe, parce que la vie politique de l'Union continue même après les referenda. Nous avons des objectifs stratégiques à mettre en ouvre, des objectifs soutenus unanimement par le Conseil européen et par le Parlement européen. Ces objectifs répondent aux préoccupations des citoyens car ils se concentrent sur la prospérité, la solidarité et la sécurité .

En effet, toutes les institutions européennes doivent être solidairement unies dans leur aspiration à aller de l'avant, à atteindre ces objectifs et à résoudre ainsi les problèmes qui préoccupent les citoyens, notamment en luttant contre le chômage et l'insécurité.

Dans les jours et semaines à venir, nous aurons à gérer ensemble une situation complexe. Je crois qu'il nous faut éviter deux pièges dangereux : le «  blame game  » et les clivages idéologiques.

Il faut éviter à tout prix d'entrer dans le «  blame game  », c'est-à-dire dans des accusations inutiles et dangereuses, et, en particulier, de faire des Institutions européennes le bouc émissaire des difficultés que l'on trouve, soit au niveau national, soit face aux défis globaux. Certes les Institutions européennes ne sont pas parfaites. Qui pourrait prétendre l'être ? C'est d'ailleurs parce que nous avons reconnu qu'il y avait certains problèmes que ma Commission, dès son entrée en fonction, il y a six mois, a décidé de préparer des initiatives pour une meilleure communication et pour améliorer la qualité de la législation (initiative «  better regulation  »). Nous nous sommes également engagés dans une réflexion sur la transparence du fonctionnement des institutions. Nous reconnaissons en effet que nous pouvons faire mieux dans les rapports de confiance et de responsabilité entre les citoyens et l'Union, notamment le regret du principe de la subsidiarité.

Mais la tentation d'imputer à «  Bruxelles  » les décisions impopulaires a déjà dans le passé provoqué des dégâts immenses et continue de le faire. Nous devons résister à cette tentation. Les réunions des représentants des Etats Membres ne doivent pas être décrites comme des champs de bataille, avec des vainqueurs et des vaincus. L'Europe se fait dans le compromis et par le compromis et c'est le devoir des représentants des gouvernements nationaux d'expliquer cela.

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Députés,

Si nous attaquons « Bruxelles » six jours par semaine, du lundi jusqu'au samedi, pouvons nous espérer que les citoyens soutiennent l'Europe le dimanche ?

Mais il y a aussi un deuxième piège qui consisterait à s'enfermer dans des clivages idéologiques. Pousser les divisions autour de deux monothéismes politiques ne rend pas service à l'Europe: le monothéisme du marché et le monothéisme de l'état. Aucun des deux, ni le « dieu marché », ni le « dieu Etat », ne résoudra tous les problèmes et toute tentative qui voudrait imposer en Europe un des deux est voué à l'échec. Ce dont nous avons besoin maintenant est d'une synthèse intelligente entre le marché et l'état qui puisse aider l'Europe à gagner, et pas à perdre, face à mondialisation. L'Europe par définition est pluriel et c'est bon qu'elle le reste.

Il est dès lors vital que nous utilisions le moment actuel pour forger un nouveau consensus politique . Le rôle de la Commission - et c'est ainsi que je le conçois - est de faciliter ce consensus et d'éviter l'approfondissement de confrontations inutiles et dangereuses. Sans ce nouveau consensus politique le compromis et les solutions seront plus difficiles.

C'est dans ce sens et avec cet objectif que je lance un appel à tous les responsables européens: notamment sur le plan national. A toutes les autorités nationales, je fais un appel pour qu'ils évitent la tentation des égoïsmes nationaux. Un appel au rassemblement autour des valeurs européennes, de l'esprit et de la culture européenne, afin qu'ensemble nous puissions bâtir un nouveau consensus politique, un consensus dynamique, un consensus constructif. Je peux vous assurer de la pleine mobilisation et disponibilité de la Commission pour y contribuer et notre volonté de travailler avec vous tous pour vous prouver que l'Europe n'est pas le problème, l'Europe est la solution.

Merci beaucoup de votre attention.